link2fleet: Comment voyez-vous évoluer l’infrastructure de recharge en Belgique ? De combine de bornes aura-t-on besoin à l’avenir pour répondre au besoin de tous les conducteurs ?
– Jean-François Cheyns: “La Belgique est un pays particulier… D’un côté, nous avons des personnes qui disposent d’une maison avec une allée et un garage. De l’autre, il y a les habitations urbaines où ce n’est pas le cas. En Belgique, on parle donc d’un mix certain : une combinaison entre la recharge à domicile chez ceux qui le peuvent, et la recharge publique dans les villes. Et cela a des implications. Ainsi, on a besoin de peu de bornes dans les campagnes, excepté celles qui doivent être installées dans le cadre des quotas légaux. Dans les campagnes, les gens vont privilégier la recharge à domicile. De l’autre côté, en milieu urbain, on va devoir investir massivement dans l’infrastructure publique. De grandes plaines de recharge sont également de plus en plus souvent installées chez les employeurs, ce qui sera déjà suffisant pour que de nombreux particuliers puissent recharger leur voiture.
l2f: Investissez-vous vous-même dans l’infrastructure publique ou projetez-vous de le faire à l’avenir ?
– J.F.C.: “Non, nous n’investissons pas personnellement dans l’infrastructure publique. MobilityPlus est un intégrateur qui fait cela au nom des clients désireux d’investir dans une infrastructure de recharge publique. Nous aidons à l’ingénierie, à la fourniture des stations de recharge, à leur placement, à leur mise en ligne et aussi à la gestion des installations. De plus, nous nous assurons que les recettes parviennent au client. C’est notre stratégie, donc nous avons nous-mêmes décidé de ne pas installer de stations de recharge publiques. »
l2f: Actuellement, il est parfois encore difficile de recharger son véhicule sur une borne publique parce que certaines cartes de recharge ne sont pas compatibles sur toutes les bornes. Ce problème sera-t-il solutionné à l’avenir ?
– J.F.C.: “À mon avis, cela a depuis été quasi supprimé. Dans les premières années, cet aspect était l’un de nos USP, le fait qu’on puisse charger n’importe où avec notre carte. Aujourd’hui, il est possible de recharger sa voiture avec une seule carte de recharge. Il n’est donc plus nécessaire d’avoir un portefeuille séparé pour y ranger tes cartes de recharge (rires). Le secteur s’en rend compte : nous devons tous travailler ensemble, il est hors de question de construire un monopole. »
l2f: Le parc fleet 100% électrique en 2026, vous y croyez ?
– J.F.C.: “La flotte de voitures de société est aujourd’hui d’à peu près 700.000 véhicules. Nous-même avons quelques gros clients, et tous sont en train de switcher vers le tout à l’électrique. Leur car-policy prévoit qu’on ne peut plus commander de véhicules thermiques, même des PHEV. Donc, je pense effectivement que tout le monde roulera en électrique en 2026, mais il y en aura toujours qui seront à la traine. Les petites PME qui ne sont pas encore occupées avec l’électrification par exemple. De plus, en raison de la crise énergétique actuelle et des effets de la pandémie que nous subissons encore, il y a des retards importants dans cette transition. Mais nous sommes sur la bonne voie. L’intention de nos clients est claire : passe au tout-électrique ! »
l2f: Comment va évoluer le marché de la recharge ? Des bornes plus rapides vont-elles arriver sur le marché ? Où les constructeurs vont-ils développer de meilleures batteries ?
– J.F.C.: “On doit regarder la technicité, car il y a des limites à la vitesse de recharge. Le réseau, l’installation à la maison ou sur le site de l’entreprise. On ne peut pas pousser ces éléments indéfiniment vers le haut pour que la charge soit plus rapide. On peut charger en AC jusqu’à un maximum de 22kW, mais très peu de voitures peuvent le faire. On utilise généralement 11kW. Ainsi, même les constructeurs montrent peu d’intérêt pour une charge plus rapide, car cela nécessiterait aussi de placer un onduleur plus grand dans la voiture. Souvent, il est plus que suffisant de charger « lentement », par exemple avec le chargeur domestique le plus lent. Il s’agit donc plutôt de l’état d’esprit suivant : « Je veux charger ma voiture rapidement », alors que ce n’est généralement pas forcément nécessaire. Alors demande-toi : « Pourquoi cela doit-il être plus rapide, alors que cela peut aussi être lent ? ». Lorsque nous parlons de courant continu, il y a aussi des limites techniques. Aujourd’hui, les câbles refroidis sont déjà utilisés pour la recharge ultra-rapide. Il est toujours possible d’être encore plus rapide, mais nous nous heurterons aux limites techniques pour que l’utilisateur ordinaire puisse le gérer. Les progrès consisteront principalement à rendre les moteurs plus économiques et les batteries plus efficaces pour qu’elles aient plus de capacité. Ce sera le progrès technologique, pas la recharge. »