Le 8 septembre 2022 à 08h47
par Damien Malvetti
Experts associés :

Charge bidirectionnelle: Stroohm fait le point sur la situation

En septembre 2020, en pleine période de Corona, le premier chargeur public bidirectionnel était installé en Belgique. En avril 2021, c’est la première zone de charge bidirectionnelle avec ABB qui était implantée chez SWECO, un projet réalisé grâce aux subsides des autorités flamandes. Récemment, un particulier a également investit dans une wallbox avec chargeur bidirectionnel. Ce n’est donc pas vraiment nouveau. La question qui se pose aujourd’hui est la suivante : est-ce que cela rendra l’essor des stations de recharge bidirectionnelles imparable et est-ce que nous en aurons bientôt tous une pour pouvoir utiliser la batterie de notre voiture comme un pack de batteries pour notre maison ? Ou cette tendance est-elle un phénomène plutôt limité ? Stroohm a analysé à quoi ressemble la situation aujourd’hui et les obstacles qui existent encore.

Qu’est-ce-qu’un chargeur bidirectionnel ?

Grâce à la technologie de charge bidirectionnelle, on peut à la fois charger et décharger sa voiture. On peut donc alimenter sa maison ou le réseau électrique avec la batterie de sa voiture. Avec ce type de station de charge, il est par exemple possible de stocker l’énergie solaire dans la batterie de sa voiture pendant la journée et de l’utiliser plus tard ou de la vendre à un prix plus élevé pendant une période de pointe. Il faut évidemment que le véhicule le permette. Actuellement, seules la Nissan Leaf, la Mitsubishi Outlander PHEV et l’ancienne Kia Soul sont dotées de cette technologie. Elles utilisent un connecteur plus ancien appelé « CHADEMO ». Les fiches CCS modernes qui sont utilisées dans toutes les voitures actuelles ne sont pas encore adaptées à ces points de charge bidirectionnels. En d’autres termes, 99% des voitures actuellement commercialisées chez nous ne sont pas compatibles. Il se murmure que certaines voitures sont techniquement déjà équipées, mais qu’elles sont verrouillées par logiciel tant qu’il n’y a pas de cadre clair autour de cette fonctionnalité.

Qu’est-ce-que l’opérateur de réseau exige ?

La fédération des gestionnaires de réseau Synergrid gère une liste de tous les onduleurs approuvés qui sont autorisés à injecter de l’électricité dans le réseau. Il existe de nombreux onduleurs pour les panneaux solaires et dorénavant aussi pour les stations de recharge bidirectionnelles. Cette liste se trouve dans le document C10/26, où la Wallbox Quasar a récemment été approuvée. A noter qu’il existe une obligation légale de signaler les points de charge à son opérateur de réseau. Pour des raisons de sécurité, les points de charge bidirectionnels doivent cesser d’injecter dans le réseau lorsqu’ils fonctionnent. Vérifiez donc soigneusement quelles bornes de recharge vous pouvez installer.

Coût

A l’heure actuelle, très peu de chargeurs bidirectionnels sont proposés à la vente et installés. Il faut dire également que le coût (comptez 5.775€) de cette nouvelle technologie est beaucoup plus élevé que celui d’une borne classique (entre 750 et 1200€). Et il n’est pas encore possible actuellement d’amortir le coût supplémentaire de 5.000€ en optimisant sa consommation électrique. Lorsque le tarif capacitaire sera officiellement introduit, cela changera peut-être la donne.

Aujourd’hui, on estime qu’un investissement allant jusqu’à 3000€ dans une borne de recharge reste financièrement intéressant.

Evidemment, si votre installation électrique est souvent sujette à des coupures, investir dans un tel chargeur peut représenter une solution de confort. Votre voiture sera alors capable d’alimenter votre maison en électricité pendant une semaine. C’est ce qui explique pourquoi, après avoir fermé ses centrales nucléaires, le Japon a fait en sorte que de nombreuses Nissan Leaf puissent se charger de façon bidirectionnelle.

Employeur et fisc

Le risque avec cette solution, c’est évidemment que des travailleurs peu scrupuleux rechargent leur véhicule au bureau et utilisent cette énergie à leur domicile pour réduire leur facture d’électricité. Si rien ne permet (encore) d’interdire cette pratique, les personnes mal intentionnées seront vite repérées car la consommation d’électricité au bureau va grimper en flèche, ce qui aura pour conséquence d’alerter le management.

Les entreprises devront donc adapter leur car-policy en intégrant l’interdiction de charger au bureau à des fins privées. Si l’employeur décide quand même de l’autoriser, les autorités fiscales risquent bien d’être d’un autre avis.  Après tout, il s’agirait d’un avantage en nature qui serait taxé en plus, ce qui signifierait que l’avantage serait annulé. Par conséquent, selon Stroohm, les flottes d’entreprise vont inhiber plutôt que promouvoir la recharge bidirectionnelle car la charge administrative et managériale liée risque d’être élevée.

Sociétés de leasing et garantie

Evidemment, la majorité des voitures électriques sont des voitures de société. Et étant donné que la charge bidirectionnelle a un impact sur le vieillissement des batteries, il y a fort à parier que les sociétés de leasing ne vont pas l’accepter, en tant que propriétaire des véhicules. La valeur résiduelle est un élément important dans la constitution de leurs loyers mensuels. Aujourd’hui, les contrats sont établis sur base des kilomètres parcourus et non sur base du nombre de cycles effectués par la batterie. Les constructeurs automobiles ne sont pas préparés à cela, car leur garantie est également basée sur le nombre de kilomètres parcourus. Stroohm s’attend donc à de nombreuses adaptations et restrictions en termes d’utilisation et de garantie sous cet angle, ce qui limitera la mise en œuvre.

Conclusion

Il y aura encore beaucoup d’adaptations à faire dans le secteur fleet avant de pouvoir introduire la charge bidirectionnelle pour les clients professionnels. Mais il est clair que cette technologie finira par s’imposer en raison de ses nombreux avantages pour la transition énergétique.

Damien Malvetti

Damien Malvetti, rédacteur de cet article

Damien Malvetti a une formation de journaliste et est passionné par les voitures, la technologie et la mobilité. Il est responsable du contenu éditorial de link2fleet et possède une connaissance approfondie du secteur des flottes et de la mobilité électrique.
Experts associés :

Articles similaires