Le 24 novembre 2022 à 09h15
par Damien Malvetti

Kaat Van Severen (Astara): « Si le temps passé aujourd’hui au volant peut servir à autre chose demain, la voiture autonome prend tout son sens »

A l’occasion de la 250e édition de notre magazine link2fleet, nous avons décidé de donner la parole à quelques grands acteurs du secteur afin de connaître leur vision sur l’évolution de la voiture de société, de l’électrification, de la fiscalité, de la mobilité, bref, de tout ce qui touche aux secteurs fleet et mobilité en Belgique. Avec ses 6 marques et son portefeuille composé aussi bien de voitures particulières, d’utilitaires et de pick-ups et de tous les types de motorisations disponibles sur le marché mais aussi bientôt de solutions de mobilité, le groupe Astara est parfaitement positionné pour l’avenir. Kaat Van Severen, Head of Fleet, nous a présenté sa vision.

link2fleet : quel regard portez-vous sur l’évolution du secteur fleet et de l’automobile ces dernières années ?

Kaat Van Severen : Après de longues années sans grandes évolutions, le secteur fleet a connu pas mal de secousses sur peu de temps. Il y a eu l’introduction de l’ATN (Avantage de Toute Nature), la modification de la déductibilité fiscale, puis une nouvelle fiscalité autour des plug-in hybrides avec une distinction entre des ‘vrais’ et des ‘faux’ hybrides, l’arrivée de la voiture électrique avec d’abord une déductibilité à 120%, puis à 100. Et plus récemment encore la Loi Van Peteghem qui va encore durcir tout cela… En quelques années, tout a évolué tellement vite. Et le produit aussi d’ailleurs. En tant que marque asiatique, notre gamme était, au départ, uniquement destinée au marché particulier. Puis les marques asiatiques ont compris qu’il fallait aussi absolument avoir une offre pour les clients fleet.  Hyundai a sorti des modèles qui avaient de vrais arguments pour convaincre les flottes : la i40 puis l’Ioniq, disponible avec toutes les motorisations possibles,… On a la chance d’être dans une marque qui évolue avec son temps et qui est même pionnière puisque nous étions les premiers à nous lancer dans l’hydrogène dès 2017 avec l’iX35 FCEV. On peut être fiers de ce que nous avons au sein des 6 marques du groupe Astara aujourd’hui et de ce qui arrivera certainement encore demain. »

 

l2f : Et comment imaginez-vous la mobilité dans 20 ans ?

K.V.S. : « Je pense qu’aujourd’hui, on a encore cette envie d’acheter une voiture et d’en être propriétaire. Beaucoup de ménages ont encore 2 voitures garées devant leur habitation. Et si on est en congé, il arrive qu’elles restent toutes les deux immobiles pendant des jours. Mais tout comme on a appris à consommer différemment des produits comme la musique ou la télévision avec des services à la demande comme Spotify et Netflix ou à ne plus faire ses courses grâce à Hello Fresh, demain, on aura un autre regard sur la voiture. On veut tous gagner du temps. On va évoluer vers un système d’abonnement qu’on utilisera en fonction de ses besoins, de missions à réaliser… On le voit déjà avec les jeunes qui n’ont plus autant d’intérêt pour la voiture. Ils préfèrent utiliser des services de transports en commun, ou pourquoi pas des voitures partagées via des système ‘pay-per-use’. »

 

l2f : Et quelle évolution pour le fleet à l’avenir ? Notamment en matière de fiscalité ?

K.V.S. : « Aujourd’hui, le marché des particuliers est en crise. Les constructeurs doivent donc miser davantage sur le marché fleet. C’est là que se trouve notre avenir. Concernant la fiscalité, on sait déjà que la déductibilité des voitures électriques va diminuer progressivement. Et je pense que ce n’est qu’une première mesure… Oui, la voiture de société et son principe sont souvent pointés du doigt. Mais ce n’est pas forcément justifié. Car si on regarde les chiffres d’immatriculations de véhicules neufs, on se rend compte que les véhicules électriques sont quasi exclusivement acquis par des entreprises. Ce sont donc les entreprises qui vont permettre de rendre le parc automobile plus vert et de réduire notre empreinte écologique. Et comme on sait aussi que le marché de l’occasion est en grande partie fournit par les anciens véhicules fleet, ce sont aussi les voitures de société d’aujourd’hui qui vont permettre aux particuliers de rouler en EV d’occasion demain. »

 

l2f : Comment voyez-vous évoluer le mix de motorisations ?

K.V.S. : « Je ne pense pas que le diesel et l’essence vont disparaitre de sitôt. Et quand bien même, ils évolueront vers un autre produit plus écologique. Selon moi, le diesel restera encore pendant un moment la meilleure alternative par exemple pour des sales qui doivent parcourir de nombreux kilomètres mais n’ont pas la possibilité de recharger à la maison. Cela dit, pour ce genre de profils, je pense que le full hybride a encore aussi un bel avenir devant lui. Et dans certains cas, notamment quand on fait beaucoup de kilomètres, le TCO d’un modèle full électrique n’est pas toujours le plus intéressant. Enfin, on le disait déjà il y a 10 ans et cela a pris un peu plus de temps que prévu, mais l’hydrogène a clairement aussi sa place dans le mix énergétique de demain. »

 

l2f : La voiture autonome, mythe ou réalité ?

K.V.S. : « Les voitures d’aujourd’hui ont tellement de technologies embarquées qu’elles sont presque déjà autonomes. Il suffit de penser aux assistants de conduite et systèmes de sécurité. Donc oui, ce sera clairement une réalité demain. Et pour ceux qui n’aiment pas conduire, c’est génial. Pour les autres, ça réduira forcément le plaisir de conduire, mais ça permettra de gagner du temps. Nous sommes tous sous pression, que ce soit au travail ou dans notre vie de tous les jours où veut toujours en faire plus. Si le temps passé à conduire aujourd’hui peut servir à autre chose demain, tout le monde y gagnera. C’est là que la voiture autonome prend tout son sens. »

 

l2f : Avec la croissance des ventes en ligne, les concessionnaires ont-ils encore un avenir ?

K.V.S. : « Evidememnt ! Mais ils vont devoir évoluer. Ils doivent comprendre qu’il n’y a plus que la voiture. Ils vont devoir changer leur mentalité et se concentrer aussi sur de nouveaux produits et services, comme les produits financiers, la mobilité, etc. A l’avenir, ils devront être capable de proposer un package avec par exemple une voiture en leasing et des solutions de mobilité comme un vélo ou une trottinette électrique. Ce sera peut-être difficile pour les plus petits, mais on va aussi assister de plus en plus à des regroupements au sein de grands groupes. Il est loin le temps où on voulait avoir un garage tous les 10 km. Les clients acceptent aujourd’hui de faire davantage de kilomètres pour se rendre au garage, d’autant plus qu’avec la voiture électrique, on doit moins souvent s’y rendre. »

Damien Malvetti

Damien Malvetti, rédacteur de cet article

Damien Malvetti a une formation de journaliste et est passionné par les voitures, la technologie et la mobilité. Il est responsable du contenu éditorial de link2fleet et possède une connaissance approfondie du secteur des flottes et de la mobilité électrique.
Cet article parle de : Véhicules , Importateurs et constructeurs

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