Le 24 janvier 2022 à 09h54
par Jeroen Evens

Case study SWIFT: « Convaincre sans contraindre à l’électromobilité »

C’est donc Caroline Ceustermans, Fleet & Mobility Manager de SWIFT, qui est repartie avec le titre de fleet-owner of the year 2021 lors des link2fleet awards le 19 octobre dernier. Quelques jours plus tard, elle nous accueillait sur le site de son entreprise à La Hulpe, pour nous présenter sa gestion de flotte et de mobilité particulière qui lui ont permis de remporter ce sésame.

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Lors de sa présentation devant le jury des link2fleet awards, l’enthousiasme et la passion de Caroline Ceustermans pour son métier ont enchanté notre jury. « Passion », c’est d’ailleurs le mot qu’elle a elle-même utilisé pour décrire son métier lorsqu’elle a reçu son prix sur la scène du Palais 10 de Brussels Expo le 19 octobre dernier. Alors quand nous l’avons rencontrée sur le site de SWIFT pour nous présenter sa gestion de flotte et de mobilité, c’est une fois de plus animée de cette passion et d’un enthousiasme débordant que Caroline nous a conté son histoire.

« Quand je suis arrivée chez SWIFT en 2012, il y avait 900 voitures en parc. Depuis lors, la flotte n’a fait que grandir puisqu’elle compte aujourd’hui quelque 1.060 voitures », raconte Caroline qui gère seule cette grande flotte, tout en étant intégrée au département RH. « Je trouve intéressant d’être intégrée à ce département car cela me permet d’être toujours en contact avec les collaborateurs, de savoir s’ils connaissent des changements dans leur vie qui peuvent impacter leur besoin en matière de mobilité. »

Car chez SWIFT, la voiture fait partie intégrante du package salarial puisque l’entreprise compte aujourd’hui 1.060 voitures pour… 1.170 membres du personnel en Belgique.

Pionnier de l’électrique

En 2015, alors que l’électrique n’en était encore qu’à ses balbutiements, Caroline était déjà convaincue par cette technologie et s’engageait avec le soutien de sa direction, dans un grand projet d’électrification. « C’est une période passionnante pour une gestionnaire de flotte chez SWIFT, car nous nous sommes engagés à réduire notre empreinte carbone. »

Elle signait alors la plus grande commande de BMW i3 de l’époque (21 véhicules) et réussissait à convaincre ses collaborateurs de faire le switch que très peu de monde était prêt à faire à l’époque. « Mettre une voiture électrique dans les mains d’un conducteur, c’est la meilleure façon de le convaincre », assure celle qui en est déjà à sa deuxième voiture 0 émission.

Aujourd’hui, la flotte de  SWIFT compte quelque 200 véhicules électrifiés (EV et PHEV), mais la gestionnaire de flotte espère encore faire grimper ce chiffre grâce à un politique qui vise à incentiver les véhicules propres. « J’aimerais avoir 30 à 40% de nouvelles commandes de véhicules électrifiés en 2022 », avoue-t-elle.

Le diesel et l’essence sont encore permis, « d’ailleurs l’essence reste la grosse tendance au niveau des commandes cette année », précise notre fleet-owner of the year. « Mais nous essayons de pousser les conducteurs à opter autant que faire se peut pour d’autres alternatives, en fonction de leurs besoins et surtout de leur « driver profile ». Pousser tout le monde à adopter l’électrique, c’est une bonne idée sur papier, mais ce n’est pas toujours réaliste. C’est pareil pour l’hybride. Prendre une hybride uniquement pour l’avantage fiscal, ce n’est pas réfléchir à long-terme ni prendre en compte les conséquences d’une mauvaise utilisation ! »

Contrats EV réduits

Ainsi les PHEV sont accessibles uniquement à certaines conditions. Le collaborateur doit habiter à un maximum de 40 km des bureaux de SWIFT, doit pouvoir recharger à domicile et sa carte carburant est limitée afin de le contraindre à rouler au moins 40% du temps en électrique.

Pour les véhicules 100% électrique par contre, il n’y a tout simplement…aucune restriction ! « Si un collaborateur souhaite passer à l’électrique, il peut rendre son véhicule thermique après 3 ans au lieu des 4 ans prévus dans le contrat. De même, les contrats de nos voitures électriques sont actuellement signés pour une durée de 3 ans (25.000 km/an) pour permettre aux collaborateurs qui ont posé ce choix écologique de changer de voiture plus rapidement que ceux qui ne l’ont pas fait. On a tenté de tout faire pour réduire au maximum les arguments négatifs des conducteurs envers l’électrique. Autant notre car-policy est limitée à 14 marques pour les véhicules thermiques, autant elle est ouverte à toutes les marques en ce qui concerne les électriques. Plus ils ont de choix, plus on a de chances de les convaincre. On rembourse aussi l’électricité utilisée à domicile sur base du tarif de la CREG et les conducteurs reçoivent en plus une carte de recharge illimitée sur le réseau de bornes publiques international. »

Sans oublier évidemment que le parking de SWIFT est déjà bien équipé de 110 bornes. « Et que 90% des recharges de nos collaborateurs se font entre travail et domicile », précise Caroline.

Gestion efficace des pool cars

Notre fleet-owner of the year 2021 l’a expliqué plus haut: les conducteurs de voitures thermiques qui souhaitent passer à un modèle full électrique peuvent le faire après 3 ans de contrat. Quid dès lors de ces véhicules qui ne sont pourtant pas encore arrivés en fin de contrat ? « Stopper les contrats risquerait de faire exploser les coûts. Du coup, ils rentrent dans ma flotte de pool. Pour éviter que ces véhicules stagnent sur le parking, tout nouvel employé chez SWIFT ne reçoit pas directement une nouvelle voiture, mais bien la liste des poolcars. Il doit choisir une voiture dans cette liste et en terminer le contrat avant de pouvoir commander un nouveau véhicule. C’est ce qui me permet d’avoir très peu de poolcars en stand-by.

D’autant plus que ces mêmes poolcars peuvent être utilisées ponctuellement par les conducteurs de voitures électriques qui auraient besoin d’un véhicule thermique pour partir en vacances par exemple.

Et si cette solution ne permet pas de répondre à l’ensemble de la demande en voitures thermiques durant les périodes de vacances scolaires, les collaborateurs sont tout simplement invités à s’échanger leurs véhicules entre eux. « C’est tout bénéfice pour nous, car les conducteurs qui ont encore une voiture thermique se retrouvent pendant une ou deux semaines au volant de la voiture électrique d’un collègue et y trouvent du plaisir. C’est bien souvent comme cela qu’ils se convainquent eux-mêmes de faire le switch », se réjouit Caroline Ceustermans.

Stratégie 2026 encore à définir

« Convaincre », c’est bien son mot d’ordre en vue de la nouvelle fiscalité 2026. « On ne sait pas encore quelle politique on va adopter dans les mois à venir. Va-t-on interdire complètement les véhicules thermiques dès le 1er juillet 2023 ? C’est difficile à dire pour l’instant. On va en tout cas mettre le paquet pour pousser davantage encore l’électrique, mais dans l’intervalle, l’hybride reste une bonne solution de transition. Sans compter que le problème mondial des chips entraine des délais conséquents et de gros soucis en matière de livraison de véhicules électriques. »

En attendant, SWIFT a officiellement marqué son engagement en faveur d’une initiative scientifique visant à réduire son empreinte carbone pour atteindre l’objectif de 1,5° fixé par les accords de Paris sur le climat. « Le passage à l’électrique ainsi que le passage à d’autres modes de transports alternatifs vont contribuer à atteindre cet objectif. »

Navettes et bike trade plan

Avec des bureaux à La Hulpe et Malines, SWIFT n’est pas l’entreprise la plus facilement accessible en transports en commun. Qu’à cela ne tienne, des solutions ont toutefois été mises en place pour inciter les collaborateurs à opter pour des solutions alternatives à la voiture. « Nous avons mis en place des navettes privées chaque matin et chaque soir entre notre site et les gares de La Hulpe et de Delta. Nous proposons aussi le système du tiers-payant pour le transport en commun et nous avons développé un bike trade plan », expose Caroline Ceustermans.

Concrètement, en échange d’un sacrifice salarial, un employé peut disposer d’un vélo ou d’une trottinette. Après 3 ans, il a la possibilité de l’acheter. « Et ce n’est pas réservé uniquement à ceux qui disposent d’une voiture de société, mais il y a des conditions à respecter une valeur maximale pour le vélo et l’obligation légale de venir au moins 20% du temps à vélo sur l’année. »

Des vélos électriques sont également mis à disposition du personnel pour voyager à l’intérieur même du site de SWIFT. « Et nous avons organisé toute l’infrastructure nécessaire aux cyclistes : vestiaires, douches, casiers et même un espace où ils peuvent réparer un pneu crevé ou effectuer toute autre intervention sur leur vélo », précise encore notre interlocutrice qui termine : « mais la mobilité, c’est aussi ne pas bouger. Et à ce titre, nous favorisons également le télétravail. »

Des bornes pour chaque type de besoin

Avec 110 bornes sur son parking pour quelques 200 véhicules électrifiés, la gestion de leur usage a nécessité la mise en place de certaines règles. « D’autant qu’on sait que le nombre de véhicules électrifiés va encore augmenter dans les mois à venir. On va certainement installer des bornes supplémentaires, mais nous n’arriverons jamais à une borne par voiture », précise Caroline Ceustermans. « Heureusement, nous prévoyons l’installation de bornes au domicile de nos collaborateurs, avons la possibilité de faire 3 jours de télétravail par semaine et avons mis en place le flex time qui permet d’avoir des horaires flexibles. Grâce à toutes ces mesures, tous nos employés ne sont pas au bureau en même temps et les conducteurs de voitures électrifiées ne doivent pas forcément charger à chacune de leur visite. »

Mais pour éviter que des véhicules stagnent sur des places équipées de bornes, l’infrastructure a été parfaitement réfléchie. Les bornes sont ainsi équipées d’un grand lettrage coloré en rouge, vert ou bleu qui indique si elles sont destinées soit aux voitures full électriques, ou aux PHEV qui peuvent recharger soit en matinée, soit en après-midi. Les horaires de recharge pour les PHEV étant indiqués sur les bornes. « Avec ce système, les bornes sont activées quand elles sont censées recharger les véhicules. Un collaborateur qui arrive le matin et veut recharger directement son PHEV peut se garer sur une borne dédiée et y laisser son véhicule toute la journée, sans craindre de bloquer la place pour quelqu’un qui devrait recharger l’après-midi. Cela évite de devoir déplacer les voitures durant la journée », expose la Fleet Manager. Tandis que les conducteurs de full électriques peuvent laisser leur véhicule en charge durant toute la journée et repartir avec une batterie remplie. »

 

Photographie: Julie Matthys

Jeroen Evens

Jeroen Evens, rédacteur de cet article

Jeroen Evens a suivi une formation en communication (KULeuven) et suit avec enthousiasme tout ce qui touche à la mobilité et aux véhicules de société. En tant que journaliste indépendant spécialisé dans le secteur fleet, il suit depuis trois ans les dernières évolutions de notre secteur.

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