Le 25 février 2024 à 13h20
par Damien Malvetti

Débat politique flamand : la prime aux EV et la fin du thermique en 2029 sont loins de faire l’unanimité

Durant l’Automotive eMotion Summit, la Febiac avait organisé des débats politiques avec les représentants des plus importants partis du pays. Un débat par langue pour pouvoir discuter des spécificités de chaque région. Pour la Flandre, c’est Lydia Peeters (Open VLD), Sammy Mahdi (CD&V), Annick De Ridder (N-VA), Joris Vandenbroucke (Vooruit) et Stijn Bex (Groen) qui se sont prêtés au jeu de donner leur avis sur quelques sujets brûlants. Voilà déjà de quoi donner quelques lignes directrices du programme de chaque parti à quelques mois des élections.

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Prime flamande aux VE : pas unanimes…

 

Lydia Peeters - photo Triptyque
Lydia Peeters

Le premier thème abordé a évidemment été celui de la prime flamande à l’achat des véhicules électriques qui a fait couler beaucoup d’encre ces dernières semaines. « On a beau avoir investi massivement dans l’infrastructure de recharge en Flandre, on voit clairement que le prix d’achat élevé des voitures électriques reste un frein pour les citoyens », a reconnu Lydia Peeters qui s’est évidemment félicitée de la mise en place de cette prime qui a, en plus, « incité de nombreux constructeurs et importateurs à diminuer le prix de certains modèles afin qu’ils soient positionnés sous la barre des 40.000 euros. »

Pour la N-VA et le CD&V cependant, cette prime n’était « pas nécessaire ». « C’est une loterie fiscale », a reproché Annick De Ridder, qui estime que l’électrification au sein du marché particulier pourra se faire grâce aux actuelles voitures de sociétés électriques qui arriveront prochainement sur le marché de l’occasion.

Pour Groen, Stijn Bex a qualifié la prime de « mauvaise mesure, parce qu’elle ne tient pas compte des besoins réels de la société ». Il a ajouté que le gouvernement flamand aurait mieux fait d’investir ces moyens dans les transports publics et la mobilité alternative « afin que les citoyens utilisent moins leur voiture, ou en tout cas de façon plus responsable. »

Joris Vandenbrouck - photo Triptyque
Joris Vandenbroucke

Joris Vandenbroucke (Vooruit) a abondé dans le même sens : « La prime est un concept ancien de mobilité, alors que la mobilité elle-même évolue. La voiture reste évidemment une solution pour se déplacer, mais il faut cesser de pousser les conducteurs dans les villes qui sont engorgées et dont les parkings ne suffisent plus ».

En guise de conclusion sur cette thématique, Lydia Peeters a indiqué qu’on pourra « enterrer la prime après les élections. Mais comment va-t-on alors réussir à réduire l’empreinte écologique de notre parc automobile ? Bien sûr, le marché des véhicules de société d’occasion peut être une solution, mais il faut alors cesser d’envoyer nos véhicules d’occasion à l’étranger. Je reste persuadée qu’il faut offrir une solution aux citoyens qui veulent passer à l’électrique, mais pour qui le prix d’achat reste un problème. »

 

Photo Triptyque

 

Infrastructure de recharge : « oui, mais »

 

Seconde thématique de ce débat, le développement de l’infrastructure de recharge pour les véhicules électriques. La ministre Open VLD a souligné que la Flandre disposait aujourd’hui de 4.000 points de charge, que ce nombre devrait grimper à 25.000 en 2025 et que 100.000 de plus devraient s’ajouter d’ici à 2030.

Annick De Ridder - photo Triptyque
Annick De Ridder

Ici aussi, la représentante N-VA s’est montrée très critique sur la politique actuelle du gouvernement flamand qui vise prioritairement à booster l’installation de bornes individuelles. « Les bornes individuelles ne sont clairement pas la solution. Ce qu’il faut, c’est développer le réseau de bornes rapides sur les autoroutes et dans les stations-services. Le développement avance beaucoup trop lentement. Il faut, selon nous, relancer des centrales nucléaires car nous ne disposons pas aujourd’hui des capacités nécessaires pour subvenir aux besoins en électricité. Il faut laisser les centrales ouvertes et mieux les gérer et parallèlement bien sûr accélérer sur les énergies renouvelables. »

Sammy Mahdi s’est montré dubitatif sur la prolongation des centrales nucléaires, tandis que Joris Vandenbroucke a insisté sur la nécessité d’investir dans les solutions de mobilité partagées, notamment dans les grandes villes. « Les familles n’ont pas forcément les moyens d’acheter une voiture électrique et d’investir dans une borne, mais il faut leur donner accès à la voiture et en ce sens, la mobilité partagée représente une solution idéale. »

 

Fin du thermique en Flandre en 2029 ? « Intenable ! »

 

« Intenable ! », c’est un peu le terme qui résume le débat sur la fin annoncée de la vente de voitures thermiques en Flandre dès 2029, alors que l’Europe a, elle, annoncé cette fin pour 2035. Notons que cette mesure n’a pas encore été votée et qu’à l’heure actuelle, seul l’Open VLD souhaite encore la voir mise en œuvre.

Annick De Ridder (N-VA) : « Pour que cela soit réaliste, nous avons fixé quelques conditions : d’abord qu’il y ait suffisamment de bornes de recharge, et ensuite, que les voitures électriques deviennent abordables. Si ces conditions ne sont pas remplies, ce sera tout simplement impossible à atteindre. »

Sammy Mahdi - Photo Triptyque
Sammy Mahdi

Même son de cloche du CD&V Sammy Mahdi : « Pourquoi vouloir avancer plus vite que l’Europe ? Mettons simplement les moyens en œuvre pour atteindre les objectifs européens de 2035. »

« 2035, c’est déjà à un jet de pierre et ça parait déjà compliqué comme délai. Il faut plutôt inciter les gens à délaisser leur voiture », a renchérit Stijn Bex (Groen).

Pour le représentant de Vooruit, il faut tout simplement « suivre le calendrier européen. C’est bien de vouloir investir dans l’électrification, mais n’oublions pas la mobilité alternative. Je m’étonne de voir qu’à Gand, par exemple, le nombre d’arrêts de bus De Lijn a diminué ces deux dernières années. »

Lydia Peeters est alors montée au front en arguant que « chaque année, nous investissons dans des moyens supplémentaires pour les transports en commun et dans la mobilité alternative. L’objectif de 2029 est tout à fait réalisable. Il suffit de regarder l’exemple norvégien où cette mesure a été fixée pour 2025 et où 80% des nouveaux véhicules sont 100% électriques. »

 

Taxe au kilomètre : presqu’un consensus

 

Mettre en place une taxe au kilomètre ? L’idée a souvent été évoquée, mais n’a encore jamais abouti. En tout cas, pas pour les voitures individuelles. La ministre de la mobilité et des transports, Lydia Peeters est plutôt pour : « Si cette taxe est basée sur le nombre de kilomètres parcourus, sur l’utilisation et sur le moment, ça pourrait être une alternative durable. D’autant plus si, en parallèle, on développe les lignes de bus et de tram pour offrir aux usagers d’autres solutions que l’usage de leur voiture. »

Un avis partagé par Joris Vandenbroucke : « Bien qu’il est difficile de prendre tous ces éléments en compte. Je ne voudrais pas que cette taxe pénalise certaines personnes plus que d’autres. Pour les travailleurs, cette taxe pourrait par exemple être prise en compte par leur employeur. »

« Il ne faut pas que cette taxe nuise à la classe moyenne », a abondé dans le même sens Annick De Ridder. « Sur le principe d’une taxe au kilomètre, nous sommes d’accord, mais qui dit taxe, dit davantage d’impôts et ça, nous ne le voulons pas. Donc actuellement, nous sommes contre. »

Stijn Bex - Photo Triptyque
Stijn Bex

Même constat au CD&V : « si on mettait en place une telle taxe, il faudrait aussi tenir compte du profil de chacun. Une personne qui vit à la campagne et ne dispose que de peu de moyens de transports alternatifs se retrouverait lésée parce qu’elle est contrainte de prendre sa voiture pour aller travaille par exemple. Idem pour quelqu’un qui doit partir travailler à 4h du matin, quand l’offre de transports en commun n’est pas disponible. Il faudrait réfléchir à une solution intelligente qui prenne en compte tous ces paramètres.

« Ici, nous avons clairement la démonstration que nous devons imaginer une solution, mais qu’elle est difficile à trouver », a résumé Stijn Bex (Groen). « Bien sûr qu’il faut réduire la congestion et les embouteillages, mais cela ne doit pas se faire sur le dos des gens et en allant puiser dans leur portefeuille. »

 

Curieux du débat entre les représentants de partis francophones? Lisez notre compte-rendu ici.

 

Photos par Photo Triptyque. 

Damien Malvetti

Damien Malvetti, rédacteur de cet article

Damien Malvetti a une formation de journaliste et est passionné par les voitures, la technologie et la mobilité. Il est responsable du contenu éditorial de link2fleet et possède une connaissance approfondie du secteur des flottes et de la mobilité électrique.
Cet article parle de : Actus

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